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Histoire d’un génocide (1885-1999)

En 100 jours, plus d’un million de personnes sont exterminées
 De la colonisation au génocide

Rwanda, 1994 : la population tutsi est victime d’un génocide d’une efficacité meurtrière effroyable.

Excitée par des années de propagande haineuse, la majorité hutu bascule dans la folie. Hommes, femmes et enfants, armés de machettes, tuent, violent et pillent des familles entières, leurs voisins de toujours. En 100 jours, plus d’un million de personnes sont exterminées, Tutsi mais aussi Hutu opposants au régime, soit plus de 15 % de la population totale.

L’opération Turquoise

RECUL DES FAR DEVANT LE FPR.

 11 juin : Alain Juppé, ministre des Affaires étrangère, déclare que la communauté internationale devra prendre de nouvelles initiatives si les combats et les exactions se poursuivent au Rwanda.

 16 juin : Alain Juppé parle de " génocide " et annonce l’imminente intervention militaire française, l’opération Turquoise. Le projet de François Mitterrand d’envoi de parachutistes français sur Kigali est empêché par Balladur et les membres plus prudents de l’exécutif de cohabitation .

 22 juin : Autorisation par le Conseil de Sécurité d’une intervention humanitaire, sur proposition de la France.

Condamnation de l’intervention française par le FPR et les partis de l’opposition démocratiques, notamment par le Premier ministre désigné par les accords d’Arusha, Faustin Twagiramungu.

 13 juin : Prise du Gitarama par le FPR. Installation du gouvernement génocidaire à Gisenyi, à la frontière zaïroise.

 23 juin : Entrée officielle des forces françaises au Rwanda par Cyangugu : " c’est là que nous trouverons (...) tous les Tutsi vivants dont nous avons besoin pour la télé " (argumente Gérard Prunier, conseiller de l’opération).

 27 juin : Paul Barril affirme sur France 2 que l’attentat contre Habyarimana serait l’œuvre du FPR avec la complicité de militaires belges dont il a reconnu l’accent sur des interceptions radiophoniques.

 28 juin : Publication du rapport des Nations Unies (rapporteur : René Degni-Segui) établissant la réalité du génocide des Tutsi.

 4 juillet : Refoulement des FAR de Kigali et de Butare.
Création par Turquoise d’une " Zone Humanitaire Sûre " (ZHS) au Sud-ouest, zone où se réfugient les responsables du génocide (dont les animateurs de la RTLM) et les populations qu’ils contrôlent. Continuation du massacre des Tutsi survivants dans la " Zone humanitaire sûre ".

 14 juillet : Prise de Ruhengeri, principale ville au Nord du Rwanda, par le FPR.

Les FAR en déroute fuient au Zaïre grâce à un couloir ouvert par l’opération Turquoise.

Afflux de deux millions de Hutu au Kivu (Zaïre). Début de l’épidémie de choléra parmi les populations conduites à Goma au Zaïre dans une région endémique pour cette maladie.

 17 juillet : PRISE DE GISENYI PAR LE FPR QUI DECLARE LA FIN DE LA GUERRE.

Le Rwanda est presque entièrement libéré, à l’exception de la ZHS contrôlée par les Français.
Formation d’un gouvernement d’union nationale à Kigali, comprenant des membres du FPR et des survivants l’opposition démocratique.

Durant l’opération Turquoise, aucune interpellation des responsables (préfets, sous-préfets, bourgmestres et chefs miliciens) ayant localement organisé les massacres n’a été faite par les militaires français (l’ONU avait pourtant établi la qualification de génocide).

Le chef des FAR, le général Augustin Bizimungu, est vu à Goma dans un véhicule de l’armée française. Des officiers français de Turquoise dissuadent les officiers des FAR désireux de rallier le gouvernement d’union nationale à Kigali.

 8 août : Nouveau déplacement de Foccart à Gbadolite, au Zaïre, où il rencontre le président Mobutu, pour le réconcilier avec son Premier ministre Kengo wa Dongo, dont la mère est une Tutsi rwandaise.

 21 août : Fin de l’opération Turquoise.
REORGANISATION DES FAR qui ont rejoint le Zaïre et bénéficient de l’aide de Mobutu. Présence d’environ 500 militaires français au Zaïre jusqu’à la fin septembre.

Au Rwanda, le fichage ethnique est supprimé sur les cartes d’identité et dans tous les fichiers.

La guerre de basse intensité contre le Rwanda

Utilisation des camps d’exilés hutu à la frontière du Rwanda comme base armée des ex-FAR et camps d’entraînement. Contrôle des camps par les anciens militaires et miliciens rwandais, ainsi que par les anciens responsables politiques. Ceux-ci empêchent le rapatriement des exilés hutu, estimés à près de deux millions.

Dans les camps de nombreux intellectuels impliqués dans le génocide (instituteurs, médecins, journalistes, cadres d’ONG locales) sont employés par les agences humanitaires.

 Octobre : Mathieu Ngirumpaste, président du MRND et responsable des miliciens interahamwe, annonce à l’AFP son retour d’un voyage en France.

 Novembre : Jérôme Bicumumpaka, " ministre des Affaires étrangères " du GIR en exil au Zaïre, déclare avoir été de nouveau officiellement reçu en France.

"Herman Cohen qui [en 1995] conserve une influence dans les Affaires africaines à Washington, s’engage personnellement (...) à obtenir à la position française le soutien des Etats-Unis" (G. Prunier).

 8 et 9 novembre : Sommet franco-africain de Biarritz. Refus de François Mitterrand d’inviter le Rwanda. Déclaration de son conseiller spécial pour l’Afrique, Bruno Delaye : " Nous n’invitons pas les nouvelles autorités rwandaises (...) elles sont trop controversées, sans compter qu’elles vont s’effondrer d’une minute à l’autre " (G.Prunier).

 9 novembre : Création du Tribunal international pour le Rwanda (TPIR) par le Conseil de Sécurité de l’ONU.

 21 novembre : Déclaration du secrétaire-général de l’ONU, Boutros Boutros-Ghali : " il y a des raisons de croire que ces éléments [les ex-FAR] préparent une invasion armée du Rwanda ".

 23 septembre : Manchette de Libération sur le " rapport Gersony ", accusant le FPR d’avoir massacré 30 000 civils dans la région de Byumba, au moment où une opération de rapatriement massif des réfugiés est envisagée par le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR). Report immédiat de l’opération .

 25 novembre : Face à l’indignation croissante, Paris, qui bloquait l’aide financière au nouveau régime de Kigali, accepte que l’Union Européenne accorde un premier soutien au Rwanda de 67 millions d’Ecus.

 Décembre : Rapport de la commission d’enquête de l’ONU constituée le 1er août, concluant que " des actes de génocide ont été commis à l’encontre du groupe tutsi par des éléments hutu agissant de manière planifiée, systématique et méthodique ".

1995

 Janvier : Intégration dans les rangs des anciennes Forces armées rwandaises (ex-FAR) de milliers d’anciens miliciens interahamwe et recrutement massif des jeunes dans les camps.

Lancement du parti RDR (Rassemblement pour le Retour des Réfugiés et la Démocratie au Rwanda) dans le camp de Mugunga, présidé par l’ancien ministre du Commerce François Nsabahimana et encadré par des personnalités proches du Hutu Power, rassemblant les cadres militaires des ex-FAR, dont les généraux Bizimungu et Kabiligi. Le RDR permet à, d’ajouter une pression politique à une pression militaires de plus en plus forte.

 18 janvier : Conférence internationale à Genève sur la reconstruction du Rwanda.
Multiples attaques des ex-FAR à l’Ouest du pays à partir de leur base située dans l’île d’Iawawa sur le lac Kivu.

 Octobre : Découverte sur l’île d’Iawawa, lors du débarquement de l’armée patriotique rwandaise (APR) grâce aux embarcations fournies par le Canada, d’un matériel de propagande identique à la presse du génocide et notamment des tracts demandant aux Hutu de " terminer le travail ". Mort de 300 ex-FAR pendant cette opération.

 16 avril : DRAME DE KIBEHO, dernier camp de déplacés hutu au Rwanda, renfermant de nombreux miliciens et responsables du génocide. A l’annonce de la fermeture du camp, la foule des déplacés est poussée en avant par les miliciens. Panique des jeunes soldats de l’armée patriotique rwandaise qui tirent dans la foule.

 19 mai : La Commission internationale d’enquête chiffre à 1800 le nombre de morts, la majorité par piétinement, d’autres tués à la machette par les miliciens du camp. Kibeho deviendra emblématique de la désinformation concernant l’APR.

 27 juin : Installation à la Haye du Tribunal pénal international (TPI) devant juger les instigateurs du génocide.

 28 août : Démission du Premier ministre Faustin Twagiramungu et de quatre autres ministres, dont Seth Sendashonga, ministre de l’Intérieur. Nomination du Premier ministre Pierre-Célestin Rwigema.

 5 novembre : Tenue du Colloque international de Kigali sur le génocide et l’impunité, qui souligne la responsabilité de la France et lui demande de contribuer à l’indemnisation des victimes.

La guerre du Kivu et le retour des exilés hutu

1996

Massacre des Tutsi du Masisi dans le Nord-Kivu par les ex-FAR et les miliciens, à partir des camps d’exilés hutu. Participation de l’armée zaïroise aux massacres et aux pillages.

 27 février : Annonce d’une nouvelle tentative de rapatriement des exilés hutu par le HCR. Manchette de Libération : " Rwanda. Enquête sur la terreur tutsi. Plus de 100 000 Hutu aurait été tués par le FPR ".

" cette information qui suscita la surprise dans tous les milieux diplomatiques et onusien de Kigali, fut largement relayée par l’ensemble de la presse francophone en Europe et en Afrique " (C. Breackman).

Nouvel arrêt du rapatriement.

 Juillet-août : Extension de la " chasse aux Tutsi " au Sud-Kivu. Les Banyamulenge (Tutsi zaïrois du Sud-Kivu) organisent de leur autodéfense avec l’aide du Rwanda.

 24 avril : En dehors de tout agenda officiel, Jacques Chirac rencontre Mobutu à l’Elysée. Jacques Foccart le rencontre également. Déclaration du porte-parole de Mobutu au retour à Kinshasa : " Le parlement est prêt pour donner son accord à une déclaration de guerre au Rwanda ".

 19 juillet : Visite du ministre de la Coopération Jacques Godfrain au Zaïre. Annonce de la reprise de la coopération franco-zaïroise.

 14 septembre : REBELLION DES BANYAMULENGE mettant l’armée zaïroise en déroute. Prise de la ville de Fizi, au sud d’Uvira.

 18 octobre : Création de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre (AFDL). Kabila est placé à la tête du mouvement.

 20 octobre : Démantèlement des camps hutu de la région d’Uvira par la rébellion. Fuite de 20 000 exilés.
Défaites successives de l’armée zaïroise, des ex-FAR et des Interahamwe.

 30 octobre : Prise de Bukavu, démantèlement des camps de la région de Goma.

Rencontre de Charles Pasqua et Mobutu à Lausanne, ainsi que des responsables foccartiens de la cellule Afrique de l’Elysée.

 4 novembre : Proposition par la France d’une intervention militaro-humanitaire internationale. Titre du Monde : " Zaïre : il faut y aller ". Dépôt par la France d’un projet d’intervention à l’ONU.

 15 novembre : Retour au Rwanda de 800 000 Hutu. Fuite dans la forêt zaïroise de 200 000 exilés, parmi les plus impliqués dans le génocide (notamment les familles des militaires et des miliciens) où ils sont pourchassés et victimes des représailles de l’AFDL et de l’APR. Massacre de plusieurs milliers de civils hutu.

 8 décembre : Renonciation à l’intervention internationale.

 17 décembre : Retour du Maréchal Mobutu au Zaïre, organisé par les " Services " et la diplomatie française.

1997

Multiplication des interventions du ministre français des affaires Etrangères, Hervé de Charrette, sur la scène internationale, pour mettre en place une nouvelle " opération humanitaire ".

Proposition d’organisation de la part de l’armée française. Les journaux Le Monde et Libération travaillent l’opinion dans ce but.

 7 mars : Demande d’une nouvelle réunion d’urgence par l’Elysée qui n’y gagnera qu’un spectaculaire camouflet diplomatique.

Constitution d’une base armée au camp d’exilés hutu de Tingi-Tingi au Zaïre. Utilisation des avions de l’aide humanitaire pour acheminer des munitions.

 2 mars : Prise de Kindu et Tingi-Tingi par l’AFDL.
Soutien de " spécialistes " français aux combats de la Division spéciale présidentielle de Mobutu, épaulés de " vrai-faux " mercenaires recrutés notamment par l’émissaire pasquaïen Jean-Charles Marchiani. Recrutement en nombre de militaires serbes et bosno-serbes impliqués dans les crimes de guerre en ex-Yougoslavie

 15 mars : Prise de Kisangani par l’AFDL.

 17 mars : MORT DE JACQUES FOCCART .
Présence au Kivu d’éléments du 13ème Régiment de Dragons Parachutistes (13ème RDP) et des CRAP (commandos de recherche et d’action en profondeur), soit 500 hommes venus de Bangui pour prêter main forte aux Forces armées zaïroises (certains déguisés en mercenaires). Ils ne pourront empêcher leur déroute.

Transit de l’armement pour Mobutu (deux gros porteurs Antonov 124 en provenance de Biélorussie) par Marseille, où la douane française ferme les yeux.

 9 avril : Prise de Lubumbashi par l’AFDL.

 16 mai : Fuite précipitée du maréchal Mobutu.

 17 mai : Prise de Kinshasa.
Déroute des mercenaires qui parviennent à s’enfuir. Evacuation des officiers zaïrois de haut rang, des autorités civiles et de certains mercenaires par un Transall français.

 18 Juillet : Arrestation par le TPIR à Nairobi de sept anciens dignitaires hutu, parmi lesquels Jean Kambanda, Premier ministre du GIR, Hassan Ngeze rédacteur en chef de Kangura, le colonel Kabiligi, et George Ruggiu, animateur belge de la RTLM.

 Août-septembre : Massacres au Rwanda de rescapés du génocide à Mutara, Rugerero, Giciye, Nkuli (en préfecture de Gisenyi et Ruhengeri). Infiltrations massives d’ex-FAR et de miliciens pour de la reconquête du Rwanda. Déstabilisation de tout le Nord-Ouest.

Massacres de Tutsi congolais, hommes, femmes et enfants, réfugiés au Rwanda dans le camps de Mudende.

 7 septembre : Mort du maréchal Mobutu au Maroc.

 10 octobre : Affrontement au Rwanda entre l’APR et des groupes importants d’ex-Far et de miliciens infiltrés.

 11 Décembre : Second grand massacre de réfugiés Tutsi congolais à Mudende, un millier de tués (1643 selon les rescapés) avec les méthodes et l’idéologie du génocide. Les 15 000 réfugiés sont déplacés vers Byumba.

Déclaration du secrétaire général de l’ONU, Kofi Anan : " Ces atrocités s’inscrivent dans la continuation du génocide de 1994 ".

Le ralliement de Kabila à la Françafrique

 Janvier : LES RESPONSABILITES FRANÇAISES DANS LE GENOCIDE DENONCEES EN FRANCE. Révélation dans Le Figaro par Patrick de Saint Exupéry, de la complicité des autorités françaises.

L’International Herald Tribune intitule un article : " La France au Rwanda : Le syndrome de Vichy du silence coupable". La presse et les autres médias suivent progressivement.

1998

 Février-mai : Massacres de rescapés du génocide et de hutu " traîtres " au Nord-ouest du Rwanda. Trie ethnique dans les bus et tueries sélectives d’écoliers Tutsi. Ces massacres font en 10 mois plus de 2 000 morts au total. Répression et représailles de l’APR contre les Interahamwe et la population civile soupçonnée de complicité. Condamnation à 5 ans de prison ferme pour six officiers de l’APR reconnus coupable de représailles disproportionnées lors d’une attaque d’infiltrés en mars 1997.

 3 mars : Création en France de la Mission d’information sur le Rwanda, présidée par Paul Quilès, pour contrôler le scandale. La volonté " d’absoudre la France " est affichée dès le départ.

 24 avril : Premières (et jusqu’à présent uniques) exécutions capitales au Rwanda pour crime de génocide.

 Mai-août : Massacre de réfugiés tutsi de 1959 dans le camp de Kinihira. Les ex-FAR et les miliciens infiltrés au Rwanda seront finalement rejetés par la population du Nord-Ouest, presque exclusivement hutu. Les prisonniers libérés par les infiltrés regagnent leur prison. Pacification progressive du Rwanda.

Multiplication des dissensions entre Katangais et rwandophones au sein de l’état-major de Kabila. Consommation du divorce quand les Katangais escortent des colonnes d’Interahamwe vers le Rwanda pour relancer la guerre civile. Recrutement de 10 000 ex-FAR et miliciens interahamwe par Kabila. Ils sont entraînés dans la base militaire de Kamina au Katanga.

Echec d’un putsch fomenté par le Rwanda et l’Ouganda pour éliminer Kabila.

 Juillet : La France fait obstruction à la Cours criminelle internationale (CCI). Le ministère de la Défense fait valoir qu’une telle institution " pourrait limiter la marge de manœuvre de nos militaires et mettre en cause des officiers français pour leur rôle en Bosnie et au Rwanda " .

 Août : Manipulation des passions xénophobes et racistes antitutsi de la population zaïroise par les autorités. Appels radiodiffusés de Kabila aux pogromes antitutsi. Abdoulaye Yerodia, Conseiller de Kabila et psychanalyste lacanien, incite les habitants de Kinshasa à " éradiquer la vermine ". Déclenchement de la chasse aux faciès dans tout le Congo-Kinshasa. Massacre de plus d’un millier de Tutsi et de personnes ressemblant au stéréotype " tutsi ".

Soutien à Kabila de l’Angola et de son vieil ami le leader Zimbabwéen Robert Mugabe. Création d’un front anti-Museveni. Esquisse de la stratégie du chaos. Elf et Total Financent les deux parties de la guerre civile angolaise. Voyage de Kabila à Khartoum pour ressusciter l’axe zaïro-soudanais. Le Soudan Envoi 2 000 soldats pour continuer leur djihad contre l’Ouganda. La guerre se transforme en un conflit régional complexe gigantesque faisant intervenir au moins huit armées nationales prédatrices et 20 milices dont le Hutu Power. Les Wardlors exigent leur part de butin.

 4 septembre : Premier jugement du tribunal pénal international (TPIR) : condamnation à perpétuité de Jean Kambanda, Premier ministre du Gouvernement intérimaire (GIR).
Laurent-Désiré Kabila, qui représentait l’humiliation et la défaite de la Françafrique, remplace désormais pour Paris l’allié Mobutu, dont il mime le comportement prédateur et les dérives criminelles : pillage du pays, refus de la démocratie, népotisme, utilisation de la haine ethnique comme instrument politique. Les alliés traditionnels de l’Elysée soutiennent Kabila : le Soudan, le Hutu Power, l’Angola, le Tchad, ainsi que la Libye, récemment ralliée à la Françafrique. La Libye fournit des armes avec l’assistance technique de l’armée française.

 Septembre : Envoi par le dictateur tchadien Idriss Déby d’un renfort de 2 000 soldats à Kabila, aussitôt après la visite au Tchad du ministre français de la Coopération Charles Josselin.

 Novembre : Déclaration de Kabila à la presse : " Les Tutsi sont traditionnellement sanguinaires (...) Ils ont amené 1 500 soldats séropositifs pour violer les femmes congolaises " (Figaro 30/11/98).

 18 novembre : Rapport de l’ONU (S/1998/1096) qui révèle qu’entre 25 000 et 30 000 ex-FAR et miliciens interahamwe sont toujours financés et massivement enrôlés dans les guerres qui déchirent l’Afrique (par Kabila dans l’ex-Zaïre, par Sassou Ngesso au Congo Brazza, par la Junte islamiste au Soudan).

 15 décembre : DEPOT DU RAPPORT DE LA MISSION D’INFORMATION SUR LE RWANDA. Paul Quilès convoque les médias audiovisuels juste avant le journal de 20H pour expliquer que " la France n’était nullement impliquée ". Il se félicite que le rapport " rejette les accusations inacceptables " suscitées par l’étranger et l’anti-France.
Paul Barril n’a pas été entendu par la Mission.

1999

 Janvier : Déclaration du Zimbabwe : " son intervention militaire en République démocratique du Congo est financée par la France l’Angola et la Libye " (BBC News, 7/1/99)

 Octobre : voyage de Charles Josselin à Kinshasa pour célébrer " des retrouvailles qui n’ont que trop tardé ".
Création d’un climat de génocide par les Interahamwe aux ordres de Kabila. Au nord-est de l’ex-Zaïre, massacre à la machette de plusieurs milliers de voisins Hema (population d’éleveurs considérée comme " cousine des Tutsi ") par des groupes de miliciens Lendu.

Instruction des soldats de Kabila par des anciens légionnaires du 2ème Régiment Etranger de Parachutistes (2ème REP).

 Début décembre : Le général Jeannou Lacaze, ancien directeur du SDECE, ancien conseiller militaire de Mobutu, se met au service de Kabila.

(...)


Documentation

La nuit rwandaise, Jan-Paul Gouteux, Izuba édition / L’Esprit Frappeur, 2002

La Frace au coeur du génocide des Tutsi, Jacques Morel, Izuba édition / L’Esprit Frappeur, 2010

Les Enfants d’Imana, histoire sociale et culturelle du Rwanda ancien, Jean Luc Galabert, Izuba édition, 2011 (réédition 2012)

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